[ Pobierz całość w formacie PDF ]
est acheminé par cargo. Des machines-outils, par ailleurs, sont produites, le plus souvent sous le contrôle de firmes
japonaises. La synthèse se produit dans des villes comme Surat Thani : il en résulte des autocars, des wagons de
chemin de fer, des ferry-boats ; tout ceci a lieu sous licence NEC, General Motors ou Fujimori. Le résultat sert en
partie à transporter des touristes occidentaux, ou des touristes occidentales comme Babette et Léa.
Je pouvais leur adresser la parole, j'étais membre du même voyage ; je ne pouvais prétendre être un amant
potentiel, ce qui limitait d'emblée les conversations possibles ; j'avais cependant acquitté le même ticket de départ ;
aussi pouvais-je, dans une certaine mesure, établir le contact. Babette et Léa, s'avéra-t-il, travaillaient dans la même
agence de com; pour l'essentiel, elles organisaient des événements. Des événements? Oui. Avec des acteurs
institutionnels, ou des entreprises qui souhaitaient développer leur département mécénat. Il y avait sûrement du fric
à ramasser, pensai-je. Oui et non. Maintenant les entreprises étaient plus axées «droits de l'homme», les
investissements s'étaient ralentis. Enfin, ça allait tout de même. Je m'informai de leur salaire : il était bon. Il aurait
pu être meilleur, mais il était bon. À peu près vingt-cinq fois celui d'un ouvrier des industries métallurgiques de
Surat Thani. L'économie est un mystère.
Après l'arrivée à l'hôtel le groupe se dispersa, enfin je suppose; je n'avais pas très envie de déjeuner avec les
autres ; j'en avais un peu marre, des autres. Je tirai les rideaux et m'allongeai. Curieusement je m'endormis tout de
suite, et je rêvai d'une beurette qui dansait dans le métro. Elle n'avait pas les traits d'Aïcha, du moins je ne crois pas.
Elle se tenait au pilier central, comme les filles dans les go-go bars. Ses seins étaient recouverts d'un bandeau de
coton minuscule, qu'elle relevait progressivement. Avec un sourire, elle les libéra tout à fait ; ils étaient gonflés,
ronds et bruns, magnifiques. Elle lécha ensuite ses doigts et se caressa les mamelons. Puis elle posa une main sur
mon pantalon, fit coulisser la braguette et sortit mon sexe, qu'elle commença à branler. Les gens passaient autour de
nous, descendaient à leurs stations. Elle se mit à quatre pattes sur le sol, releva sa mini-jupe ; elle ne portait rien en
dessous. Sa vulve était accueillante, entourée de poils très noirs, comme un cadeau ; je commençai à la pénétrer. La
rame était à demi pleine, mais personne ne faisait attention à nous. Tout cela ne pouvait en aucun cas se produire.
C'était un rêve de famine, le rêve ridicule d'un homme déjà âgé.
Je me réveillai vers cinq heures, constatai que les draps étaient largement tachés de sperme. Une pollution
nocturne... c'était attendrissant. Je constatai aussi, à ma vive surprise, que je bandais encore ; ça devait être le
climat. Un cafard reposait, allongé sur le dos, au milieu de la table de nuit ; on distinguait nettement le détail de ses
pattes. Celui-là n'avait plus de soucis à se faire, comme aurait dit mon père. Mon père, pour sa part, était mort fin
2000 ; il avait bien fait. Son existence se trouvait ainsi entièrement incluse dans le xxe siècle, dont il constituait un
élément hideusement significatif. Moi-même je survivais, dans un état moyen. J'étais dans la quarantaine, enfin
dans le début de la quarantaine, je n'avais après tout que quarante ans; j'étais à peu près à mi-course. Le décès de
mon père me laissait une certaine liberté ; je n'avais pas dit mon dernier mot.
Situé sur la côte est de Koh Samui, l'hôtel évoquait parfaitement l'image du paradis tropical tel qu'on le
représente dans les dépliants d'agence. Les collines, alentour, étaient recouvertes d'une jungle épaisse. Les
bâtiments bas, entourés de feuillages, s'étageaient en gradins jusqu'à une immense piscine ovale, avec un jacuzzi à
chaque extrémité. On pouvait nager jusqu'au bar, situé sur une île au centre de la piscine. Quelques mètres plus bas
il y avait une plage de sable blanc, et la mer. Je jetai un regard réservé sur l'environnement; de loin je reconnus
Lionel, qui s'ébrouait entre les vagues comme un dauphin handicapé. Puis je rebroussai chemin, rejoignant le bar
par une mince passerelle qui surplombait la piscine. Avec une décontraction étudiée, je pris connaissance de la
carte des cocktails; la happy hour venait de commencer.
Je venais d'opter pour un Singapore Sling lorsque Babette fit son apparition. «Eh bien, fis-je, eh bien...» Elle
portait un deux-pièces très couvrant, short moulant et bandeau large, dans une harmonie de bleu clair et de bleu
foncé. Le tissu semblait d'une finesse exceptionnelle; c'était un maillot de bain qui ne devait prendre toute sa valeur
qu'une fois mouillé. «Vous ne vous baignez pas ? demanda-t-elle. Meuh...» fis-je. Léa apparut à son tour, plus
classiquement sexy, en une-pièce de vinyle rouge vif, zippé de fermetures éclair noires qui s'ouvraient sur la peau
(l'une d'entre elles, qui traversait son sein gauche, laissait apparaître un mamelon) et largement échancré en bas.
Elle m'adressa un signe de tête avant de rejoindre Babette au bord de l'eau ; lorsqu'elle se retourna, je pus me rendre
compte qu'elle avait des fesses parfaites. Elles s'étaient méfiées de moi au départ ; mais depuis que je leur avais
adressé la parole sur le ferry elles avaient conclu que j'étais un être humain inoffensif, et relativement distrayant.
Elles avaient raison : c'était à peu près ça.
Elles plongèrent avec ensemble. Je tournai la tête pour mater un peu. À la table voisine, il y avait un sosie de
Robert Hue. Une fois mouillé, le maillot de Babette était en effet spectaculaire : on distinguait parfaitement les
mamelons et la raie des fesses ; on apercevait même la légère surépaisseur des poils pubiens, bien qu'elle ait opté
pour une coupe assez courte. Pendant ce temps des gens travaillaient, produisaient des denrées utiles ; ou inutiles,
parfois. Ils produisaient. Qu'avais-je produit moi-même, pendant mes quarante années d'existence ? À vrai dire, pas
[ Pobierz całość w formacie PDF ]